Si tous les observateurs du secteur perçoivent une accélération du nombre de projets « connectés et durables » dans les territoires, qu’en est-il précisément ? De quels types de projet parle-t-on et dans quels territoires ? Quelles sont les dynamiques qui les portent et à quel niveau ?
L'observatoire constate, sur l'échantillon considéré, que de nombreux projets sont en cours, que peu ont été déployés à grande échelle, mais que très peu ont été abandonnés. |
Pour avoir une idée un peu précise de l’ampleur de cette accélération, les auteurs de l’étude (1) se sont basés sur les réponses de cinquante huit collectivités territoriales, parmi lesquelles on compte 5 départements, 22 syndicats, 13 communautés urbaines/métropoles, 9 communautés de communes et communautés d’agglo et neuf communes. Des collectivités prises dans toutes les typologies de territoire (péri urbain, urbain, rural, mixte…) dont la taille varie de moins de 5000 à 5 millions d’habitants.
Concernant le type de projets connectés en lien avec la transition environnementale, les collectivités ont été interrogées sur les cas d’usage qui font l’objet de projets et sur le statut de chacun de ces projets (en cours, réalisé à grande échelle, projet abandonné). Il en ressort que les projets réalisés et déployés à grande échelle sont encore minoritaires, mais leur nombre reste toujours plus important ce celui des projets abandonnés. Ces derniers restent peu significatifs, sauf dans la mobilité (4 sur 17).
« Ce qui est en cours est plus important que ce qui a été fait », souligne Agnès le Meil, déléguée territoires connectés et durables chez Infranum, et référente de l’Observatoire pour ce syndicat professionnel, pour résumer la tendance générale. « L’objectif, poursuit-elle, était aussi de mesurer comment les choses avaient évolué depuis l’étude Pipame (De la smart city à la réalité des territoires connectés, octobre 2021), et comment les cas d’usage s’intègrent dans les territoires ».
Cinq cas d’usage au crible
Le décor étant posé sur ces dix cas d’usage correspondant à autant de verticales métier, les auteurs de l’observatoire se sont penchés plus en détail sur cinq thématiques : énergie des bâtiments, éclairage public, gestion de l’eau, gestion des déchets et gestion des risques environnementaux. Sur chaque thématique, l’étude détaille les impacts financier, environnemental et humain des projets, ainsi que la complexité estimée de mise en œuvre, les coûts et les technologies utilisées. Les enjeux particuliers de mise en œuvre et les critères faisant varier les coûts sont également recensés.
L’étude constate par ailleurs qu’il reste encore un certain flou sur la question des plateformes de données. « Les collectivités connaissent le sujet, confirme Loïc Haÿ, expert technique à la FNCCR et référent de l’étude pour cette association de collectivités, mais avec l’arrivée de l’IoT et de leurs données, il y a encore une marche à franchir ». En cause, un premier sujet de terminologie (superviseur ? hyperviseur ? jumeau numérique ?) qui reste à éclaircir pour bien saisir ce « maillon central et complexe » des projets. « La réalité du terrain, poursuit-il, c’est qu’on est surtout sur de la supervision, sur des interfaces métier ».
La mutuailisation apparaît clairement comme l'une des clés du succès des projets de Territoires connectés et durables. |
Dans l’ensemble, toutefois, l’essentiel des enjeux de la data est bien compris, tout comme la prédisposition affichée par les collectivités répondantes à soutenir les projets de plateformes mutualisées.
Ce dernier constat est partagé et salué par Julian Calderon, Expert Infrastructures Numériques à la Caisse des Dépôts. Il souligne une « réelle dynamique de mutualisation, qui se révèle nécessaire pour accélérer l’adoption des nouveaux services et pour assurer la souveraineté de ces initiatives ».
Dans cette optique, poursuit-il, « nous avons constaté trois grands types d’acteurs clés pour mettre en places les offres mutualisées : les EPCI (par leurs compétences), les syndicats (par leur modèle économique) et les acteurs départementaux et régionaux (pour la planification territoriale) ».
Maturité, portage politique fort, convergence métiers/DSI : les clés du succès
Autre aspect intéressant de l’étude : les clés du succès se précisent. C’est ce que révèlent les entretiens menés avec les collectivités et avec les industriels. Pour dégager cette tendance, ces échanges ont été analysés en passant quatre thématiques (gouvernance des projets, financement/contrats, technologies et données) au tamis des critères tels que les « constats positifs, les leviers d’accélération, la prise en compte d’observations et celle de points d’attention ».
Il en ressort entre autres le constat de la maturité grandissante des petites et moyennes collectivités, ainsi que la prise de conscience de l’importance du portage politique des projets ou encore une véritable confluence qui se met en place entre les métiers et la DSI.
Sur la gestion des données, deux points émergent clairement : la nécessité de pouvoir assurer la souveraineté et la sécurité des données. On voit aussi progresser la notion d’une utilisation raisonnable et raisonnée de la donnée ; une prise de conscience qui fait écho avec l’impératif de numérique responsable, et qu’on pourrait résumer par la règle des trois « u » : la donnée doit être « utile, utilisable et utilisée ».
(1) étude réalisée par KPMG, Artelia et Inlo avocats entre juin et décembre 2023 par le biais d’un questionnaire auto administré diffusé auprès de 58 collectivités et d’entreprises du secteur, complété par une trentaine d’entretiens individuels.