Le numérique souverain est une thématique qui prend de l’ampleur au sein des collectivités. A Montfort-sur-Meu, une petite commune bretonne de 6 500 habitants, le maire Fabrice Dalino a décidé de substituer WhatsApp par Treebal comme outil de messagerie des agents pour échanger des informations. « Le fondateur de Treebal est né à Montfort-sur-Meu, cela nous est apparu comme naturel d’adopter une solution française, dont les messages sont chiffrés de bout en bout, pour nos usages de réseau social, au lieu d’applications américaines dont on pourrait se méfier », affirme-t-il. Après un an d’expérimentation auprès des 23 élus de la ville et des 12 élus de l’intercommunalité Montfort Communauté, Fabrice Dalino observe une utilisation moins fréquente des e-mails en interne en faveur d’échanges plus réactifs sur l’application.
Treebal (qui tire son nom de tree, arbres en anglais, et bal, boîte aux lettres) a été développée à Rennes en 2020, pendant la crise du covid, par David Godest, Samuel Le Port et Sophie Leclercq. Deux versions sont disponibles depuis avril 2021 sur n’importe quelle génération de mobile : une pour le grand public, similaire à WhatsApp, est accessible gratuitement. Une déclinaison professionnelle, sur abonnement, donne quant à elle accès aux utilisateurs d’associations, collectivités, entreprises ou CSE à différents services, comme la visioconférence.
« On peut activer l’application par e-mail ou QR-code, nul besoin de donner un numéro de téléphone. Ce sont les élus qui administrent la messagerie comme ils l’entendent, et non les équipes de Treebal », précise Samuel Le Port, qui propose aux professionnels d’héberger l’application sur leurs propres datacenters, ou ceux de leur choix, plutôt que sur OVH, pour gagner en souveraineté. Le modèle d’affaires est basé sur un abonnement professionnel de deux euros par mois par utilisateur. A Montfort-sur-Meu, Treebal revient à un coût de 5 000 euros par an.
Créer un écosystème sur le territoire
Les fondateurs de Treebal mettent en avant la sobriété de leur application et leur engagement en faveur de l’environnement pour la démarquer sur le marché. « Une notification mobile génère 0,00024 grammes d'équivalent CO2 selon une analyse réalisée avec l'aide de l’Ademe, alors qu’un mail en cause 4 grammes », souligne Samuel Le Port. Les messages sont effacés automatiquement à une fréquence déterminée par l’utilisateur afin d’en réduire l’impact environnemental. Une pratique qui a séduit à Montfort-sur-Meu. « Nous avions au départ opté pour une temporalité d’un an, mais finalement nous l’avons réduit à trois mois pour être plus sobre », détaille Pierre Chauveau, directeur général des services de Montfort-sur-Meu. Treebal reverse par ailleurs 10% de ses revenus à des partenaires, comme Planète Urgences ou Ecotree, pour financer des projets de reforestation. Près de 51 500 arbres ont été plantés, d’après le message affiché sur l’application.
Comme WhatsApp, Treebal permet de créer et de rejoindre des groupes, nommés dans l’application des tribus, entre un nombre illimité d’utilisateurs afin de faciliter la communication descendante. Des groupes de conversations visent pour leur part à simplifier les échanges entre utilisateurs professionnels. « Certains services municipaux sont encore aujourd’hui très cloisonnés. Nous voulons être une plateforme collaborative et mettre en relation, par exemple dans un chantier de construction, l’architecte avec l’urbaniste, l’élu, les prestataires du chantier, etc. », explique Samuel Le Port, qui veut créer un écosystème autour de ses clients et mettre ainsi Montfort-sur-Meu en lien avec ses entreprises en faisant de Treebal un élément de cohésion du territoire.
"Avoir un lien plus direct et plus interactif avec les habitants"
A Montfort-sur-Meu, ces groupes représentent la prochaine étape d’utilisation. « Cet usage s’inscrit dans une logique de concertation et de gestion de projets. Nous sommes en cours de déploiement de l’application auprès d’une trentaine de cadres de l’intercommunalité et de représentants du personnel », précise Pierre Chauveau, qui envisage également de créer une tribu pour mettre en relation le réseau des écoles de la commune avec l’adjointe aux affaires scolaires et les services de la ville dédiés. Certaines associations sportives de la commune utilisent déjà Treebal de leur côté.
Montfort-sur-Meu projette de créer sous peu un groupe à l’attention de ses citoyens, pour leur communiquer de l’information. Ce canal remplacerait facilement, selon Samuel Le Port, la page Facebook de la Ville. « Cela nous permettra d’avoir un lien plus direct et plus interactif avec les habitants, en leur posant des questions, comme ce qui peut se faire avec les sondages WhatsApp », se réjouit Pierre Chauveau. Avec Treebal, Montfort-sur-Meu se félicite de disposer d’un outil de démocratie directe.
