« Définir par jumeau numérique la végétalisation à apporter dans le cadre du réaménagement urbain de la place Tony de Graaf nous a fait gagner 5,5°C en moins sur le lieu et 14°C à l’emplacement du parkings. » Denis Larghero, maire de Meudon et vice-président du Département des Hauts-de-Seine, a détaillé le bilan du projet de jumeau numérique porté par la ville, lors du salon BIM World à Paris Porte de Versailles, le 2 avril dernier. L’objectif : réaliser la copie virtuelle de trois espaces publics de Meudon en cours de réaménagement urbain afin d’identifier les îlots de chaleur et les meilleures essences d’arbre à implanter pour améliorer le confort thermique sur site.
L’initiative a démarré en septembre dernier, par la signature d’un partenariat entre Meudon et Dassault Systèmes, « un acteur du territoire », a rappelé Denis Larghero. Elle s’inscrit dans la politique de lutte contre le réchauffement climatique que la ville de 47 000 habitants mène avec le programme Meudon 2040. « Les collectivités doivent agir vite avec des budgets limités, elles n’ont pas le droit de se tromper pour le moindre euro public. Cet outil du jumeau numérique est idéal pour faire les bons choix rapidement et montrer qu’avec un investissement raisonnable (le projet a eu un coût inférieur à 40 000 euros, ndlr), on peut arriver à des résultats significatifs », a assuré le maire de Meudon.
La conception du jumeau numérique a été réalisée via l’application Simulia sur la plateforme 3D Experience de l’entreprise, un environnement qui permet de modéliser le territoire et ses asset à partir d’un modèle unique avant d’effectuer différentes simulations. Il a été le fruit de trois mois de travail de la part des équipes de la ville et de Dassault Systèmes pour centraliser les données utiles à la simulation. « Nous avons récolté aussi bien des données sur l’infrastructure de la place (bâtiments, matériaux, etc.) que sur les conditions météorologiques pour évaluer leurs effets sur la circulation de l’air et la température », nous a précisé Frédéric Gille, en charge du projet chez Dassault Systèmes, qui travaille sur le développement d’une IA d’analyse d’images satellites comme source de données d’entrée.
Une étude des vents a démontré que la circulation de l’air reste faible au centre de la place. A l’issue des scénarios modélisés, 870 m² de goudron ont été désimperméabilisés, dont 12 places de stationnement et 465 m² de massifs ont été installés. « Planter neuf arbres supplémentaires peut paraître anecdotique mais la simulation de leur emplacement a abouti à un résultat maximal sur la baisse de température », a affirmé Denis Larghero.
Un outil de pédagogie citoyenne
Le jumeau numérique a pu être présenté aux riverains à l’occasion de l’inauguration des travaux d’aménagement de la place, ce samedi 5 avril. « Le jumeau numérique devient un outil de pédagogie pour la concertation citoyenne en embarquant la population dans l’évolution urbaine. Certains habitants n’avaient pas perçus la différence avant et après travaux, la prise de conscience s’est faite par la visualisation numérique », s’est réjoui Denis Larghero. Une concertation citoyenne ayant rassemblé 1 300 personnes avait été menée au préalable. Sur le salon BIM World, Eric Malenfer, président de Gexpertise, a justement mis en avant le rôle de la technologie pour la démocratie participative : « Les PLUI ne donnent pas aux citoyens la possibilité de comprendre l’aménagement urbain. Cela ne peut se faire que par le partage de la visualisation, car il est anormal que tout se décide seulement dans le bureau des maires. »
Les équipes de Frédéric Gille ont présenté au maire de Meudon, à l’issue du salon, une nouvelle itération du jumeau numérique de la place Tony de Graaf afin de poursuivre le redesign du lieu. En parallèle lui ont été communiqué les premiers résultats concernant le deuxième espace publics modélisé, à savoir la place Simone Weil à Meudon-la-Forêt. Fort des modèles du jumeau numérique de la place Tony de Graaf, les équipes de Dassault Systèmes n’ont mis que deux semaines à modéliser ce deuxième espace.
« Nous voulons changer d’échelle et faire grandir le jumeau numérique de la place publique au quartier et à la ville, sur des projets d’aménagement de plusieurs hectares avec de nouvelles problématiques, a garanti Denis Larghero. En ma qualité de maire responsable du Plan communal de sauvegarde, j’estime que l’idéal serait de l’étendre à la gestion des crises, de modéliser les exercices et de tenir à jour l’actualisation de l’environnement. Régulièrement, la voirie change ou de nouveaux bâtiments sont construits, ce qui a impact sur l’organisation. »
Meudon n’en a pas fini d’innover : la ville est accompagnée par la Métropole du Grand Paris et peut poursuivre ses expérimentations connexes liées au territoire connecté et durable avec le programme Alumni des Quartiers métropolitains d’innovation. Et Denis Larghero de conclure : « Il est important à mes yeux de veiller à rendre ces outil réplicables à l’échelle dans les villes voisines. »
Sur ce sujet, lire notre dossier « Quelles données pour quels jumeaux numériques » dans SCM n°66 à paraître mi avril.